Les différents tons de la narration peuvent servir à évoquer les humeurs d’un auteur dans lesquels se reflètent ses états d’âme et ceux qu’il veut faire éprouver au lecteur. On parle habituellement du « ton de la narration » : il s’agit de l’émotion principale que l’auteur choisit comme fil conducteur stylistique, pour produire une émotion semblable chez le lecteur qui ressentira alors avec une intensité particulière l’affect imposé par l’auteur.
Qu’est-ce que le ton de la narration ?
Trois expressions s’emploient pour définir le ton de la narration, ce procédé stylistique choisi à dessein pour façonner l’humeur d’un texte. Le « ton de la narration », aussi appelé « tonalité » (comme en musique) ou « registre littéraire », a pour fonction d’instaurer les grands traits du ressenti induit chez le lecteur.
Le « ton » de la narration correspond d’abord à l’intention de l’auteur ; puis à l’attitude adoptée par ses personnages pour nous faire éprouver diverses réactions : rire, tristesse, réflexion, sarcasme… Comme la gamme des émotions est considérablement étendue, on parle volontiers de « registre littéraire », certains préférant cette appellation pour désigner chacune des catégories renvoyant à une tonalité narrative bien définie.
Ces « tonalités » narratives ou « registres littéraires » ne doivent pas être confondus avec les « registres de langue » qui, eux, caractérisent différentes façons de s’exprimer : langage parlé, familier, soutenu. À la différence des « registres de langue », les « tons » ou « registres littéraires » renvoient à l’intention du texte, c’est-à-dire à l’affect singulier voulu par l’auteur afin de donner au texte sa coloration unique (joyeuse, mordante, acerbe, etc.).
Ton, registre ou genre ?
Les « tons », « tonalités » ou « registres littéraires », ne doivent pas être confondus non plus avec les « genres littéraires », au nombre de cinq : le genre narratif (roman, nouvelle, autobiographie, conte, fable), le genre poétique (rondeau, sonnet, haïku, vers libre, calligrammes), le genre théâtral (comédie, tragédie, drame, farce, dialogue), le genre épistolaire (correspondance par lettres) et le genre argumentatif (essai, pamphlet, diatribe, éloge, oraison, manifeste).
En effet, « tons de la narration » ou « tonalités narratives » ne concernent qu’un effet de style maintenu durant un temps donné. Ce style teinte le tout ou une partie d’une œuvre, alors que le « genre littéraire » inscrit l’ouvrage dans une catégorie littéraire fixée objectivement dans l’histoire de la littérature. Ainsi, il peut arriver que l’on remarque un « ton » comique dans une œuvre tragique, ou que l’on perçoive une « tonalité » didactique dans un ouvrage polémique.
Les principaux tons de la narration
On recense au moins une vingtaine de « tons », « tonalités » ou « registres littéraires ». Les plus connus sont les registres fantastique, dramatique, tragique, comique (avec ses sous-registres burlesque et héroï-comique), satirique, épique, lyrique, pathétique, merveilleux, didactique, ironique, laudatif, réaliste, oratoire, polémique, héroïque, parodique. Chacun de ces tons de la narration met l’accent sur une atmosphère qui colore tout le texte : la magie, le surnaturel, la terreur, la drôlerie, l’ostentatoire, la tristesse, la féérie, l’autorité, la moquerie, l’admiration, la confrontation des idées, le ridicule, pour n’en nommer que quelques-uns.
Pourquoi choisir un ton narratif ?
Employer un ton spécifique déclenche une identification plus prononcée du lecteur à l’auteur, et met en relief le parti-pris narratif de ce dernier. Définir une tonalité permet au texte de reproduire une humeur spécifique, que rehausse la vivacité de l’émotion choisie.
Ainsi, choisir un ton de narration est un art qui a une visée essentiellement stratégique : en adoptant telle tonalité narrative, l’auteur nous fait entrer non seulement dans ses émotions, mais il provoque chez le lecteur des réactions prolongeant celles de ses personnages. Pour cela, l’auteur va employer certains mots ou tournures de style pour susciter l’effet désiré.
Ainsi, tel quiproquo insolite, fondé sur un jeu de mots, une maladresse d’un personnage, est destiné à nous faire rire : c’est le « comique de situation ». Telle suite d’exclamations indique une sainte et grandiose souffrance : on baigne dans la tragédie. Telle cadence saccadée vise à nous faire peur : le rythme de la phrase introduit un élément d’inquiétude, de pathos ou d’effroi. Telle autre, avec ses verbes mordants et sa critique désinvolte, se moque du lecteur : c’est l’ironie et son deuxième degré, si différent de l’humour.
Comment utiliser les différents tons de la narration pour enrichir son texte ?
D’abord, il convient d’identifier quelle réaction l’on cherche à provoquer chez le lecteur : faire rire, vibrer, pleurer, rager, attendrir ? Susciter un engagement, une révolte ou plutôt de l’empathie ?
Si l’intention est de faire rire, l’on forgera un ton comique à l’aide d’effets de style tels que : répétitions, apostrophes, bégaiement, jeux de mots. Si l’on veut faire pleurer, on hachera les segments de phrases, on créera des ruptures évoquant des soupirs, des sanglots ; on mettra dans la bouche des personnages des exclamations déchirantes. Si l’on veut susciter l’admiration, on espacera le rythme en insérant des pauses, des silences ; on utilisera des adjectifs laudatifs. Si l’on espère persuader et convaincre, on emploiera des adverbes d’intensité, des verbes à l’impératif, on aura recours à des énumérations pour justifier une certaine logique démonstrative. Enfin, si l’on veut parodier un personnage, on utilisera ses tics de langage, on créera un mimétisme stylistique.
Armé pour mieux agir ?
En conclusion, l’effet recherché dans la narration est celui qui déterminera l’humeur du texte. Une fois le ton de la narration choisi, on adoptera les particularités stylistiques, syntaxiques et narratives qui lui correspondent. Tout comme en musique, certaines tonalités peuvent être joyeuses, mélancoliques ou pathétiques (cf. la sonate éponyme de Beethoven) ; elles marquent parfois de leur sceau l’époque qu’elles reflètent, comme le romantisme ou le symbolisme.
Par exemple, un effet de surprise ne pourra généralement pas être traduit par une très longue phrase qui s’éternise : on préférera une courte apostrophe, une exclamation dont la vivacité suscitera la même surprise chez le lecteur. Adopter le ton juste, c’est donc choisir ses outils en fonction de son intention, et moduler ses interventions pour maintenir dans la durée voulue l’effet recherché.
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À consulter :
- Registre littéraire (Wikipédia)
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