Les pronoms de reprise vous donnent la migraine ? Ils ont pourtant leur utilité : « Gabrielle, Sophia et Véronica se rendent au musée. Puis Gabrielle, Sophia et Véronica vont à la piscine. » Sans eux, vous répéteriez les mêmes sujets, comme ce long « Gabrielle, Sophia et Véronica », sans pouvoir employer un pronom de reprise tel que « elles ». Mais attention! Ils ne sont pas miraculeux. Les pronoms de reprise comportent un risque : celui d’être mal employés, surtout lorsque les sujets et pronoms se multiplient au sein de votre manuscrit. Si c’est le cas, ils peuvent rendre le lecteur confus : à qui ou à quoi fait référence tel ou tel pronom ? De qui parle-t-on ici, déjà ? Afin de clarifier votre propos pour les lecteurs, nous vous proposons ici différents éléments de considération[1].
Qu’est-ce qu’un pronom de reprise ?
Le pronom de reprise reprend un mot appelé l’antécédent ; il permet que ce mot ne se répète pas.
- Exemple : « J’ai revu Anna (antécédent) à la conférence. Elle (pronom de reprise) est désormais à la retraite. »
C’est par l’antécédent « Anna » que l’on constate la signification du pronom de reprise « elle ». C’est pourquoi l’on dit que « [l]e pronom de reprise n’a pas de sens en lui-même ; c’est l’antécédent qui permet de comprendre ce à quoi il fait référence. » De plus, c’est grâce au pronom « elle » qu’on peut ne pas réécrire « Anna ».
Le pronom de reprise peut aussi être « la », « le », « celle-ci », « vous », etc., pourvu qu’il reprenne quelque chose, entre autres :
- un nom propre: Je sortirai avec Mélissa et Yves (antécédent) et retournerai à l’appartement avec eux (pronom de reprise) ;
- un nom commun: Son chat joue avec la souris (antécédent) et la (pronom de reprise) mange ;
- tout autre groupe nominal: Comme les enfants de Sonia (antécédent) paraissaient fatigués, Gregory les (pronom de reprise) a reconduits.
Il peut reprendre d’autres sortes de pronoms avec ces fonctions :
- complément indirect: Tu lui (antécédent) avais fait un signe, mais celui-ci (pronom de reprise) n’avait pas répondu ;
- complément du nom: Ma sœur trouve ces gâteaux (antécédent) délicieux. Je lui en (pronom de reprise) donnerai la recette ;
- attribut du sujet: Les enseignants se montrent inquiets (antécédent), la directrice le (pronom de reprise) semble aussi.
Les types de pronoms de reprise
Souvent, le pronom de reprise est un pronom personnel : « je », « tu », « me », « ils »…
- Exemple : « Comme vos garçons sont devenus attachants! À leurs âges, ça m’étonnerait qu’ils changent de personnalité. »
Il peut devenir un pronom possessif, qui se forme habituellement d’un article défini (« le », « la », « les ») suivi d’un autre mot (« tien », « sienne », « nôtre », « leur »…) : « le mien », « la tienne », « les siennes »…
- Exemple : « Si tu oublies tes lunettes de plongée, je te prêterai les miennes. »
L’usage des pronoms de reprise démonstratifs (« ça », « ceci », « ce », « celle/celles-ci », « celui/ceux-là »…) est de reprendre un mot, un groupe de mots, voire une phrase.
- Exemple : « David parle cinq langues. Cela étonne les personnes qu’il rencontre. »
Le pronom de reprise « cela » reprend le fait que David parle cinq langues.
Pronoms de reprise et erreurs courantes
Assurez-vous néanmoins que le pronom de reprise mis en valeur ait les mêmes genre et nombre que l’élément qu’il reprend afin que les lecteurs reconnaissent bien son sens.
- Exemple : « Marie et Nicole ont visité Tommy à l’hôpital, mais cruellement, elles ne leur ont pas montré de compassion. »
Il s’avérerait plutôt correct de remplacer « leur » par « lui », car c’est à Tommy (soit à une seule personne : au singulier) qu’elles auraient dû faire preuve de sympathie. Ce pronom de reprise n’a pas à être au pluriel. On l’a sans doute confondu avec le sujet principal, « Marie et Nicole », au pluriel, de là cette erreur syntaxique.
Mais le plus important, c’est de se montrer certain que le pronom reprenne un élément du texte que le lecteur reconnaîtra aisément sans en confondre avec un autre. En écrivant, restez clair en tout temps! Sinon, la confusion quant au référent peut se montrer au rendez-vous.
- Exemple : « Sa sœur agonisait et la flamme du bougeoir vacillait. À minuit, elle s’est éteinte[2]. »
Quel est l’antécédent de « elle » : « sa sœur » ou « la flamme du bougeoir » ? C’est la jeune femme qui s’est éteinte (qui est morte, puisqu’elle agonise) ou la flamme ?
- Exemple : « Le jardinier réussit à tuer le loup après un féroce combat. Il gît sur le sol. »
Que symbolise « il » ? Qui se retrouve par terre : le jardinier ou le loup ? Selon la mention du « féroce combat », il peut paraître difficile de le deviner…
Voici une phrase sur laquelle, au contraire, on peut se fier au contexte afin de saisir le référent :
- Exemple : « Le fermier Albert est revenu avec un panier. Celui-ci contient une centaine de fraises. »
On sait que le pronom de reprise « celui-ci » représente le panier, et non « Albert », car ce ne peut être le fermier qui contient des fraises.
Comment contourner ces erreurs de pronoms ?
Quelques relectures personnelles serviront à construire des phrases grammaticalement correctes, à mettre en relief les confusions possibles. Surlignez vos antécédents ainsi que vos pronoms de reprise dans le but de vous assurer de leur clarté, de leur exactitude.
Prêtez attention à ce qui pourrait devenir aux yeux des autres une ambiguïté : cela vous aidera à reformuler une phrase si besoin est. Rendez plus limpide son contexte. Une bonne idée est de trouver des synonymes. Ces derniers possèdent une fonction magique que les pronoms n’ont pas toujours : effacer tout risque d’incertitude.
- Exemple : « Le ballon se retrouve près du caillou. Tim le ramasse. »
Qu’est-ce que Tim reprend : le ballon ou le caillou ? Pour atténuer cette confusion, vous pourriez préciser ce qu’il ramasse par un synonyme, et non par « le ».
- Exemple : « Le ballon se retrouve près du caillou. Tim ramasse son jouet. »
Servez-vous également des périphrases. Ce sont des expressions figées, ancrées dans l’usage, figurant quelque chose ou quelqu’un : « le septième art » qui désigne le cinéma, « le roi de la pop » Michael Jackson, « la Ville Lumière » Paris, « le petit écran » la télévision… Tout comme le synonyme, la périphrase peut démêler une ambivalence.
- Exemple : « Étienne tenait à visiter le lion, mais le roi des animaux s’était endormi. »
Avec un pronom de reprise comme « il », on se serait interrogé : qui, d’Étienne ou du lion, s’était assoupi ? La périphrase « le roi des animaux » tranche cette question. On aurait tout aussi pu remplacer « lion » par un synonyme : « animal », « bête », « mammifère », « félin »… Les dictionnaires, particulièrement, vous aident à dénicher de nouveaux mots.
N’hésitez pas à soumettre votre récit à des regards extérieurs. S’il y a des problèmes que vous n’avez pas décelés, incluant des erreurs d’accord ou des soucis d’incohérence, ces personnes vous le diront.
Varier votre vocabulaire sans fautes, c’est possible
Les pronoms de reprise, qu’ils soient personnels, possessifs ou démonstratifs, demeurent un outil fabuleux pour éviter les répétitions de prénoms, de noms communs, d’autres pronoms, et pour varier avec style la structure de vos phrases sans les alourdir.
Ça, c’est s’ils sont employés correctement! En révisant votre roman, ou en vous faisant relire par autrui, en relevant les erreurs de genre et de nombre, les ambiguïtés possibles, et en faisant bon usage des synonymes ainsi que des périphrases, vous vous trouverez sur une meilleure voie pour les utiliser de manière judicieuse.
Vos lecteurs suivront les aventures de vos personnages sans avoir constamment à relire une phrase problématique. Leur lecture sera plus fluide, agréable. Vous aurez amélioré votre style et gommé les répétitions, élégamment, sans donner de maux de tête à quiconque. Bonne (ré)écriture!
[1] Le Bureau de la traduction du Canada et les sites de la Vitrine linguistique, d’Alloprof et des Ressources du Portail linguistique du Canada, consultés le 30 août 2023, ont inspiré certains exemples pour ce texte.
[2] Phrase inspirée de Pascal Perrat, Comment écrire son premier roman, Éditions 365, « Le cercle des écrivains », 2011, p. 132.
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