On le constate lors de chaque salon du livre, les pans de murs sont tapissés d’affiches géantes présentant des vedettes du petit et grand écran dont ce n’est pas a priori le métier, mais qui se sont lancées dans l’écriture et attirent les foules. Au grand plaisir des éditeurs, les lecteurs s’empressent de faire la file devant leurs stands en vue d’obtenir une précieuse dédicace et, pourquoi pas, avoir l’occasion de prendre aussi quelques égoportraits à partager sur les réseaux sociaux.

Le phénomène du vedettariat dans le milieu littéraire prend une telle ampleur, en Amérique comme en Europe, que les auteurs qui ne jouissent pas d’un tel aura de popularité en viennent à se demander si, devant une telle promotion des têtes d’affiche, ils ne sont pas laissés pour compte.

Festival du livre des célébrités

En Europe, on a même fondé un festival du livre des célébrités dont Michel Drucker est l’actuel président d’honneur (2018). « Depuis une dizaine d’années, les livres écrits ou co-écrits par des célébrités connaissent un engouement exceptionnel auprès du public. Les ventes sont vertigineuses et les lecteurs, toujours plus nombreux sont au rendez-vous! » peut-on lire sur le site web officiel de l’événement. On peut toujours se demander s’il convient de se réjouir du fait que les célébrités se retrouvent désormais entre elles plutôt que de faire ombrage aux autres auteurs dans les divers salons du livre. Il reste qu’en regard de la publication, que l’on est en droit de soupçonner plus facile dû à la notoriété, cela ne change rien à la donne.

Il est évident que les aspirants à la publication, surtout ceux qui ont connu la déception parfois répétée des refus de manuscrits, peuvent avoir l’impression qu’ils sont défavorisés par rapport aux personnalités publiques et qu’il leur faudrait être connus pour capter l’attention des éditeurs.

Le revers de la médaille

Bien connu en tant que chanteur et animateur radio, Maxime Landry compte plusieurs publications chez Libre Expression. Quand on lui demande s’il pense que son statut de vedette lui a permis d’accéder plus facilement à la publication, il répond qu’un bon éditeur doit considérer les manuscrits qu’il reçoit, et cela peu importe qui en sont les auteurs. « Même si je suis conscient qu’il est plus facile pour un artiste d’obtenir un rendez-vous direct avec l’éditeur, ce n’est pas l’éditeur qui écrit le livre. Et il ne pourrait pas publier n’importe quoi, aux dépens de sa crédibilité d’éditeur. Pour le reste, c’est au lecteur d’adhérer ou pas, à ce que l’auteur/artiste lui offre… »

Lui a-t-on fait sentir, au moment de la publication, qu’il jouissait d’un privilège que d’autres n’ont pas? Il assure que pour sa part, le syndrome de l’imposteur n’existe plus. Il considère ne prendre la place de personne. « Je prends celle qui me revient et celle que mes lecteurs ont bien voulu me faire. » Par ailleurs, il déclare qu’il a été bien accueilli par les auteurs publiés. « C’était un peu une crainte pour moi. Mais dès le premier Salon du livre, j’ai discuté avec des auteurs qui m’ont fait sentir que j’avais ma place. »

De son côté, Christine Lamer, comédienne et animatrice, qui a publié quelques fictions chez Recto-Verso, témoigne du fait que si la notoriété publique l’a poussée à l’écriture de sa petite histoire, et que celle-ci a été favorablement reçue chez Publistar, elle a senti qu’il en allait différemment en ce qui concerne la fiction : « J’ai dû passer par le comité de lecture et la note de passage pour voir mon premier manuscrit accepté. Des débuts difficiles qui ressemblaient à ceux à la radio en 1972! »

En regard de la suite des choses, elle affirme que « chaque parution est un recommencement, comme un nouveau rôle au théâtre. » A-t-elle senti que le regard des écrivains pesait sur elle avec un air de reproche? Elle confirme à cet effet que « le milieu individualiste des pairs est sans doute plus sévère envers une personnalité connue qui se lance en écriture. »

Ghislain Taschereau, bien connu en tant que comédien, humoriste et réalisateur, compte à son actif la publication de quelques fictions. « Je pense que ça va de soi qu’il est plus facile de trouver un éditeur quand on est connu. Cela dit, ça ne veut pas dire que les éditeurs sont prêts à publier n’importe quoi sous prétexte que l’auteur est une personnalité publique. Les trois enquêtes de l’Inspecteur Specteur que j’ai publiées de 1998 à 2001 se sont écoulées à plus de 60,000 exemplaires. Ce qui veut dire que les lecteurs ont continué de me suivre après le premier tome. S’ils n’avaient pas aimé, ça se serait arrêté après la première enquête. »

Cette constatation tend à démontrer que l’éditeur a retenu le manuscrit d’abord et avant tout pour l’intérêt qu’il représentait, en tant que texte, et non seulement à cause de la popularité déjà acquise de son auteur dans un autre domaine. Ghislain est d’avis que ce serait une arme à double tranchant pour un éditeur que de ne se fier qu’à la notoriété d’une personne pour accepter de la publier ou non. « Il en va de la crédibilité de l’éditeur, à mon avis. », ajoute-t-il.

Pour ce qui est de l’accueil des pairs, il confie qu’en ce qui le concerne, étant donné le type de personnages qu’il incarnait à la télévision, l’accueil qu’on lui a réservé dans le milieu du livre a été plus ou moins chaleureux, et ce, autant de la part du monde de la littérature que du public. « En fait, dans le milieu littéraire, il y avait une certaine jalousie à voir des files devant mon stand. Toutefois, je me suis vite fait des amis. Mais surtout parmi ceux et celles qui ne se prenaient pas au sérieux, naturellement. Chez le public, on concevait mal qu’un petit comique de la tévé ait été capable de faire suffisamment de phrases complètes pour arriver à écrire un roman. Alors que j’étais assis derrière mes livres dans les salons, plusieurs personnes du public venaient me demander ce que je faisais là. Ils ne voyaient que l’humoriste et ne pensaient pas que je pouvais être là parce que j’avais écrit un roman. Ils devaient penser que je m’exprimais vraiment comme Bob Binette, j’imagine. » Il a pu constater également que la critique l’attendait avec un préjugé défavorable. « Encore plus quand tu écris du polar (loufoque, dans mon cas), car plusieurs considèrent ce type de roman comme étant de la paralittérature. »

La notoriété semble faciliter le processus éditorial, mais il convient de souligner que des nuances sont à apporter et que cette renommée, préalablement acquise dans un autre domaine que l’écriture, comporte aussi ses désavantages.

À propos de la publication, l’acteur Patrice Godin qui en est à sa 2e parution, considère que d’être issu du milieu de la télévision et du cinéma l’a sans doute aidé à être publié, mais il ne croit pas qu’il aurait pu l’être si son travail avait été raté ou bâclé. « Ça n’aurait été à l’avantage de personne. Maintenant, de savoir si ce même manuscrit aurait été accepté si j’étais apparu de nulle part, difficile à dire… N’étant pas éditeur et n’ayant pas les connaissances sur le sujet et la manière dont ils font les choix de publications, je ne peux pas m’avancer. »

Pour ce qui est de la crédibilité d’auteur, il confirme avoir ressenti, dans quelques salons du livre, une certaine distance, une certaine froideur de la part d’auteurs confirmés. « Mais ça ne m’a pas affecté, déclare-t-il. Je peux le comprendre. Je débarquais là avec mes livres et mon étiquette de “vedette” (étiquette que je déteste). Mais en bout de ligne, ça ne change rien. C’est le talent qui compte et celui-ci ne se mesure pas avec un seul ouvrage, mais sur le long terme. Je pense que c’est la même chose pour la crédibilité. Elle aussi se forge sur le long terme. »

Bref, s’il apparaît plus facile de soulever l’intérêt des éditeurs, lorsqu’on jouit d’une grande popularité dans un autre domaine, en contrepartie il peut s’avérer difficile de faire valoir sa crédibilité dans le monde littéraire et cela, il va sans dire, particulièrement lorsqu’on publie de la fiction.

Nadine Lauzon, éditrice chez Groupe Librex assure que « c’est d’abord une question de lignes éditoriales, de la qualité du manuscrit et/ou de l’originalité du projet. » À ce sujet, elle ajoute : « Oui, nous publions parfois des livres écrits par des personnalités publiques — sur des sujets qui font partie de nos lignes éditoriales —, mais nous faisons paraître aussi des premiers ouvrages. »

Selon elle, si les auteurs inconnus ont parfois du mal à trouver un éditeur, c’est peut-être qu’ils devraient s’appliquer à connaître davantage les maisons d’édition, pour mieux cibler les éditeurs qui pourraient s’intéresser à leur manuscrit et aussi voir à bien présenter leur projet afin d’augmenter leur chance de sélection.

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L’édition traditionnelle fait rêver beaucoup d’auteurs qui espèrent connaître, grâce à celle-ci, le succès qu’ils imaginent pouvoir être celui de leur livre publié. Or, compte tenu des milliers de manuscrits que reçoivent annuellement les maisons d’édition, il s’avère difficile d’y accéder.

Le recours aux services d’un agent littéraire apparaît pour plusieurs le meilleur moyen d’atteindre l’objectif de la publication professionnelle. Il importe toutefois de savoir que les démarches visant à trouver un agent littéraire ne sont pas sans présenter, elles aussi, certaines difficultés.

Si vous songez à la possibilité de recourir aux services d’un agent littéraire, prenez le temps de vous renseigner au sujet de ce métier qui s’exerce dans l’ombre du milieu éditorial.

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